Vous passez quelques jours dans un hôtel Campanile à Bordeaux pour faire de l’œnotourisme et parcourir l’une des routes des vins de Bordeaux ? Au cours de vos visites de caves, de vignobles ou de châteaux, vous entendrez parler fréquemment de Grands Crus Classés. On vous dit tout sur cette distinction, son origine et les vins qu’elle concerne.
Le classement des vins de Bordeaux devient officiel en 1855, sous Napoléon III, pour les besoins de l’Exposition universelle et de la visibilité des différents crus de la région. Elle est demandée par la Chambre de Commerce au Syndicat des courtiers afin d’être exposée à Paris aux côtés des quelques bouteilles sélectionnées pour être présentées.
Parmi les trois acteurs principaux du commerce du vin — producteurs, négociants et courtiers —, les courtiers étaient en effet les plus à même de dresser une liste et une classification des plus grands vins, par leur connaissance directe des vignobles et leur sens du marché.
Pour effectuer cette tache dans le délai imparti (moins d’un mois), ils se basent alors sur un système commercial de classement qui a déjà cours dans le Bordelais. Ce dernier consiste à structurer les domaines en fonction du prix de leur vin, lui-même dépendant du succès et de la reconnaissance des acheteurs : en l’occurrence, à la fin du 17e, les Britanniques.
Ce sont d’abord les châteaux très prisés du Haut-Brion, Margaux, Latour et Lafite qui créent leur catégorie commerciale sous le nom de « premiers crus ».
Au milieu du 18e siècle, d’autres producteurs de la région élèvent leurs standards de qualité et gagnent en réputation, sans pour autant égaler le prestige des 4 châteaux « premiers crus ». Ce seront donc les « deuxièmes crus ».
Les catégories « troisièmes crus » et « quatrièmes crus » font leur apparition successivement à la fin du 18e et au début du 19e.
En 1850, la hiérarchie commerciale des producteurs de vins de Bordeaux compte 5 catégories bien établies, facilitant ainsi le travail des courtiers chargés d’établir quelques années plus tard une classification officielle.
La distinction « Grands Crus classés en 1855 » est basée sur des critères de notoriété et de prix. Deux types de vins sont concernés : les rouges et les blancs liquoreux. Les catégories diffèrent pour chaque type de vin.
Pour les rouges, on distingue en effet les 5 catégories de la hiérarchie commerciale historique :
Pour les blancs liquoreux, on distingue seulement 3 catégories :
Le classement des Grands Crus de 1855 n’a connu qu’une seule révision, en 1973, avec la promotion du château Mouton Rothschild qui passera de 2e grand cru à premier grand cru. Il offre donc une image de la hiérarchie notoire des domaines girondins au 19e siècle.
Les terroirs représentés
Si les Graves étaient les vins les plus recherchés au 17e siècle, ils ont été ensuite surpassés par les vins du Médoc. Au 19e, un seul vin du vignoble des Graves, celui du château de Haut-Brion, pouvait rivaliser avec les vins médoquins d’un point de vue tarifaire.
En ce qui concerne les vins rouges donc, tous les châteaux classés sont des domaines du vignoble du Médoc, à l’exception du Haut-Brion, vin rouge des Graves d’appellation Pessac-Léognan.
Les blancs liquoreux classés Grands Crus en 1855 sont quant à eux des vins d’appellation Sauternes et Barsac, issus des vignobles du Sauternais.
Les châteaux classés
Les rouges
Les rouges Grands Crus classés en 1855 comprennent 61 crus dont 60 du Médoc, parmi lesquels 4 premiers crus. Trois sont issus des vignes de Pauillac : château Lafite-Rothschild, château Latour, château Mouton-Rothschild. S’ajoute un domaine de Margaux, château Margaux, ainsi que le château Haut-Brion, seul représentant de Pessac-Léognan.
Plus nombreux, les deuxièmes crus comprennent 14 châteaux, parmi lesquels plusieurs de Margaux, de Pauillac, de Saint-Julien et de Saint-Estèphe. Citons notamment les châteaux Lascombes, Montrose, Pichon-Baron ou Cos d’Estournel.
Les troisièmes, quatrièmes et cinquièmes crus sont respectivement composé de 14, 10 et 18 châteaux. On retrouve notamment dans ces catégories des châteaux du Haut-Médoc, comme La Lagune (3e cru), la Tour Carnet (4e cru) ou Cantemerle (5e cru).
Les blancs
Les vins blancs classés grands crus sont composés de 27 crus des AOC de Barsac et de Sauternes. Le seul Premier cru supérieur est celui du château d’Yquem, d’AOC Sauternes.
La catégorie des Premiers crus compte ensuite 11 crus, soit 9 du Sauternais et 2 de Barsac. Parmi les Sauternes figurent notamment les châteaux Haut-Peyraguey et Rayne Vigneau. Le vignoble de Barsac est représenté par les châteaux Coutet et Climens.
La catégorie des Deuxièmes crus, enfin, compte 14 crus, dont 6 du Sauternais (comme les châteaux d’Arche et Romer) et 8 du Barsacais (comme les châteaux de Myrat et Caillou).
Autres classements des vins de Bordeaux
La hiérarchie de 1855 concerne une grande majorité de rouges du Médoc et de blancs du Sauternais, vendus à des prix élevés. Les autres grands vins de Bordeaux, dont le succès commercial et la notoriété sont arrivés postérieurement, ont donc fait l’objet d’un classement distinct. Il existe ainsi :
Il est créé en 1953 et réalisé par l’Institut national des appellations d’origine (INAO). Il concerne 16 crus, tous de l’AOC Pessac-Léognan. Le Haut-Brion est ainsi classé deux fois, parmi les crus de Graves et parmi les grands crus de 1855.
Depuis 1955, l’INAO procède également au classement des crus d’appellation Saint-Émilion. Les critères retenus sont ceux de la constance et de l’aptitude au vieillissement. La liste est révisée tous les 10 ans. Celle de 2022 distingue 2 Premiers Grands Crus A : châteaux Pavie et Figeac. Viennent ensuite 12 Premiers Grands Crus B, et 71 classés.
La distinction est établie par la chambre de commerce de Bordeaux et par la Chambre d’agriculture de Gironde depuis 1932. Elle concerne des vins rouges à prix accessibles, fait l’objet de dégustations à l’aveugle et peut être révisée tous les 5 ans. Trois niveaux récompensent la performance de chaque cru : les Crus Bourgeois, les Crus Bourgeois Supérieurs et les Crus Bourgeois Exceptionnels.